Droit d'auteur - Pourquoi on ne peut pas tout simplement réutiliser du contenu. En trois réponses.

19 juin 2015

Qu'en est-il si vous souhaitez réutiliser des textes et des photos créés par des concepteurs-rédacteurs, des journalistes et des photographes ? Est-ce autorisé ? Quels accords pouvez-vous conclure ? L'avocat et spécialiste du droit d'auteur Jan-Diederik Lindemans, du cabinet d'avocats Crowell & Morning, nous apporte les réponses.

Dans la pratique, on entend dire beaucoup de choses sur la réutilisation de textes et de photos créés par des concepteurs-rédacteurs, des journalistes et des photographes », explique l'avocat Jan-Diederik Lindemans, du cabinet d'avocats Crowell & Morning. « Les agences de marketing sont confrontées au quotidien à des contenus qu'elles achètent pour une mission précise et qu'elles veulent réutiliser par la suite dans un autre contexte.

Cet article répondra à trois questions essentielles sur les droits d’auteur.

  1. Puis-je réutiliser en toute liberté les textes et les images ?
  2. Pourquoi ne puis-je pas réutiliser les textes que j’ai achetés ?
  3. Quels accords pouvez-vous conclure ?

 

1. Puis-je réutiliser en toute liberté les textes et les images ?

La réponse à cette question est claire et nette : non. Vous ne pouvez pas tout simplement reproduire ou réutiliser des textes et des images sans l’autorisation de l’auteur (concepteur-rédacteur, photographe, graphiste, etc.). Dans certaines conditions très strictes (à des fins précises, mention de la source et de l’auteur (ou du détenteur des droits d’auteur), etc.), vous pouvez, sans autorisation, renvoyer à un texte publié ou en citer des passages.

Vous avez fait rédiger des textes à un concepteur rédacteur pour un blog ? Vous pouvez les publier sur un blog, mais pas les regrouper dans un livre.

Vous avez demandé à une agence de contenu de créer un magazine ? Vous ne pouvez pas copier ces textes, pas plus que les images, sur le site de l’entreprise ou dans le bulletin d’informations.

Pourquoi pas ? Car très souvent des droits de propriété intellectuelle portent sur les textes et les images. Vous ne pouvez pas tout simplement faire fi de ces droits d’auteur.

Qu’est ce que la propriété intellectuelle ?

Mais au fait, qu’est-ce que la propriété intellectuelle ?

La propriété intellectuelle est un ensemble de droits exclusifs qui confèrent, le plus souvent pendant une période déterminée, un droit d’exclusivité au titulaire pour utiliser et exploiter son travail. Ceux-ci comprennent, entre autres, les droits de propriété industrielle (le droit des marques, le droit de brevet, le droit d’obtenteur, etc.) et le droit d’auteur. Ce dernier protège les auteurs de créations, qu’il s’agisse d’images, de textes ou d’autres travaux originaux. Par l’intermédiaire du droit d’auteur, le législateur entend protéger les créateurs, parfois naïfs, contre les abus de leur créativité.

La loi relative au droit d’auteur est pratiquement toujours interprétée en faveur de celui qui a créé. Cette protection porte sur la relation entre l’auteur, le bureau et le client qui fait appel au bureau.

Le concepteur-rédacteur, le journaliste et le photographe qui créent une œuvre au caractère suffisamment original, en détiennent automatiquement le droit d’auteur. Contrairement à une marque ou à un brevet, ils ne doivent rien faire, et ne doivent dès lors pas enregistrer leur création.

En pratique, de nombreux débats font rage

Cela semble clair. Pourtant, en pratique, les donneurs d’ordre, les concepteurs-rédacteurs et les photographes sont souvent en désaccord.

L’avocat et le spécialiste des droits de propriété intellectuelle Jan-Diederik Lindemans, du cabinet d’avocats Crowell & Morning, est souvent confronté à des problèmes de droits d’auteur.

2. Pourquoi ne puis-je pas réutiliser les textes que j’ai achetés ?

Pourquoi ne puis-je pas réutiliser les textes que j’ai achetés ? Cette question est compréhensible, concède l’avocat Lindemans. « Le travail est fourni. Vous avez payé pour l’avoir. Et pourtant, vous ne pourriez pas encore en faire ce que vous voulez ? »

Pour comprendre pourquoi il convient de demander une nouvelle fois l’autorisation de l’auteur et/ou pourquoi celui-ci a encore le droit à une rémunération (supplémentaire), attardons-nous sur le droit d’auteur.

Le droit d’auteur se compose de deux volets

Le droit d’auteur se compose de deux volets. Chacun d’entre eux a ses propres conséquences.

Le droit patrimonial. Il s’agit de l’autorisation d’utiliser une œuvre, de quelque manière que ce soit. D’une part existe l’autorisation de pouvoir communiquer l’œuvre au public (le droit de communication au public) et d’autre part, celle de pouvoir reproduire l’œuvre (le droit de reproduction). Lorsqu’un auteur donne l’autorisation d’utiliser son œuvre, il peut déterminer dans un accord quels droits d’utilisation sont transférés et pour quelle(s) application(s) précise(s) son travail peut être utilisé. Par exemple : le droit d’utilisation pour la publication dans un rapport annuel et sur le site internet de l’entreprise.

Les droits moraux. L’auteur conserve ses droits moraux et ne peut pas les transmettre à un tiers. Parmi ceux-ci figurent notamment le droit de paternité, qui permet à l’auteur ou au photographe de toujours pouvoir revendiquer la « paternité » de cette œuvre et donc de pouvoir associer son nom ou un pseudonyme à son travail. L’auteur peut également décider de publier son œuvre de manière anonyme.

L’autorisation de l’auteur est toujours requise

Les droits patrimoniaux sont transmissibles. Cela veut dire que l’auteur originel peut y renoncer, contre paiement ou non. Il n’est pas possible de transmettre les droits moraux. Par contre, il est possible de définir dans un accord comment ils seront (ne seront pas) exercés.

Conséquences d’une utilisation illégitime

Quiconque utilise une œuvre sans autorisation se rend coupable d’un point de vue juridique de « contrefaçon ». Il ou elle viole les droits d’auteur.

Cela peut avoir différentes conséquences juridiques, comme :

  • L’obligation d’interrompre la publication.
  • Des dommages et intérêts éventuels.
  • La communication de la violation du droit d’auteur sur le site, dans le magazine, etc., où la violation a été commise.

3. Quels accords pouvez-vous conclure ?

La réutilisation des textes et des photos est pourtant parfois possible. La conclusion d’un contrat bien solide est déjà un grand pas.

Pas de solution juridique concluante

Il n’existe aucune solution juridique concluante ni aucune formule magique qui soit applicable à toutes les situations. Aux yeux de Lindemans, « la meilleure solution est et reste un contrat solide entre les deux parties ».

L’avocat recommande de passer au préalable des accords clairs et précis. Et de les coucher sur papier. Non seulement pour l’utilisation prévue, mais aussi d’emblée pour un élargissement de l’utilisation à (plus) long terme.

Conseils pour un bon contrat

Un bon contrat, équilibré pour toutes les parties, devrait à n’en point douter comporter deux éléments : une rémunération correcte pour l’utilisation de ce qui a été créé et des certitudes sur la manière dont peut être utilisée la création.

Lindemans préconise les éléments suivants pour obtenir un bon contrat :

  1. Les droits d’auteur sont détenus par le créateur du contenu. Fixez clairement et complètement sur papier ce que l’on ne peut pas faire de ce contenu créé.
  2. Définissez de la manière la plus large possible le droit d’utilisation quoi est « acheté » à la base. Faites en sorte que cette définition soit assez précise, mais pas limitative.
  3. N’érigez pas la renonciation des droits moraux en point de rupture. D’un point de vue purement juridique, l’auteur ne peut pas les céder.
  4. Déterminez à l’avance les modalités et le tarif pour la réutilisation sur d’autres médias.
  5. Convenez de l’endroit et de la manière pour mentionner le nom de l’auteur. Près du texte, de la photo ? Dans le colophon ? Ou vous n’en faites aucune mention ?
  6. Cherchez un équilibre entre une rémunération raisonnable et une cession la plus large possible des droits de l’auteur et du photographe.
  7. Rémunérez correctement l’auteur et le photographe. Sinon, il y a très peu de chances qu’il signe la clause de transfert.
  8. Sachez qu’un tel contrat est toujours limité dans le temps. Un « contrat perpétuel » n’est pas valide. En revanche, « un contrat pour la durée du droit d’auteur » l’est.

Jan-Diederik Lindemans
Advocaat-Avocat / Partner
Crowell & Moring LLP | www.crowell.com
jlindemans@crowell.com
Direct 32.2.282.1832 | Fax : 32.2.230.6399

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