Une approche de content marketing est-elle utile dans le cadre de la communication durable ?
Chris Van Gils : « Absolument. En tant que content marketer, vous proposez des récits fondés qui, en outre, s’inscrivent dans un récit et une stratégie plus larges. En outre, le content marketing porte sur une communication crédible, qui part de ce que veut savoir la cible. Et puis, le fait que le content marketing tourne autour du long terme et l’élaboration de relations durables colle évidemment tout à fait avec les ambitions de la communication sur le développement durable. »
Bart Lombaerts: « Sans doute devrions-nous aller encore plus loin et affirmer que le content marketing n’est pas simplement utile dans la communication sur la durabilité, mais qu’il est tout simplement indispensable. Je ne crois pas que cela réussisse si au moins une partie de ce que l’on communique n’est pas basée sur des techniques de content marketing. Car là où la durabilité est une affaire de chiffres et de données, la communication sur le développement durable implique une transposition importante vers le storytelling et une touche humaine. Compte tenu des mots-clés que sont l’authenticité, l’exhaustivité et la transparence, une approche journalistique est d’ailleurs bonne à prendre. »
Les content marketers jurent par la pertinence pour la cible et préfèrent éviter les messages qui ne concernent que la propre marque : la communication sur le développement durable n’est-elle alors pas contre-intuitive ?
Lombaerts : « On pourrait dire que la communication sur le développement durable est la forme de content marketing ultime, mais il est vrai qu’ici, le principe qu’il ne faut pas parler de soi-même ne vaut pas. Dès le début, il s’agit de jouer cartes sur table et de raconter son récit en toute transparence. »
Van Gils : « Cependant, il est vrai qu’il ne faut pas parler que de soi. C’est une facette essentielle de la communication sur la durabilité, mais ce n’est pas la seule. Ainsi, il s’agit aussi de changer une vision du monde ou un mode de vie. Cet aspect inspirant de la communication sur le développement durable offre une opportunité supplémentaire, qui ajoute en outre une couche essentielle à la notion du rapportage obligatoire et qui, une fois encore, est très proche du content marketing. »
Vous dites de la communication sur le développement durable que c’est ‘plus que jamais une opportunité’ : pourquoi ?
Lombaerts : « Si vous vous y prenez de la bonne manière et que vous contribuez efficacement à une transition vers le développement durable, elle peut vraiment vous aider à développer votre marque ou vos marques aujourd’hui. J’irais même plus loin : nous sommes convaincus qu’elle se transformera rapidement en une condition sine qua non pour qu’une entreprise ait encore une raison d’exister. »
Van Gils : « En outre, quiconque réfléchit aux ambitions en matière de durabilité et à la communication correspondante se retrouve rapidement confronté à l’essence de sa marque. Ainsi, vous le constateriez immédiatement si votre purpose et votre récit de marque n’étaient pas encore tout à fait au point. Le fait que la communication sur le développement durable et le content marketing puissent agir comme une sonnette d’alarme dans ce sens et servir de déclencheur pour repenser l’ensemble de votre marque est un autre atout majeur supplémentaire. »
Dans quelle mesure un content hub est-il important dans la communication sur le développement durable ?
Van Gils : « Avant, la page ‘À propos de nous’ ou celle sur la durabilité étaient parfois considérées comme un passage obligé, mais aujourd’hui elles sont vraiment essentielles. Et fonctionnelles, car toutes les parties prenantes sauront immédiatement ce que représente votre entreprise et y trouveront également un lien vers votre rapport de développement durable. »
Lombaerts : « Dans le content marketing, vous vous efforcez d’atteindre un objectif par le biais de storytelling et de récits, que vous rassemblez sur votre hub. Dans la communication de durabilité, les choses ne se font toutefois pas de manière aussi informelle. Plutôt que tous vos récits, ce sont tous les faits qui doivent y être présentés. Une fois que ce document de base solide est en place, les fondements sont présents pour diffuser davantage le récit. L’approche correspond alors à celle d’autres actions de content marketing : sélectionner les bons types de contenu, formats et canaux pour attirer votre public cible vers l’ensemble du récit, en gardant toujours à l’esprit que les gens n’ont jamais tout vu, qu’il faut donc être omniprésent et que la répétition ne fait pas de mal. »
Les owned media sont-ils donc au centre de la communication sur le développement durable ?
Lombaerts : « Start with owned, aim for earned and boost with paid est un principe qui s’applique certainement ici aussi. »
Van Gils : « Tout commence en effet par un récit solide, fondé, étayé et vérifié, éventuellement plutôt informatif et factuel. Ce n’est qu’après, lorsque le rapport de durabilité est au point et que vous êtes en mesure d’y rattacher de bons récits, que vous pourrez aussi miser sur le Paid. »
Devons-nous toujours voir le rapport de durabilité comme le point de départ ?
Lombaerts : « Il est important de réaliser que la communication de durabilité est un processus continu. Plutôt que d’échafauder votre rapport de développement durable de manière rétrospective, en vous posant la question de savoir ce que vous avez en fait réalisé durant l’année écoulée, le rapport peut être le point final d’un calendrier de communication. Si, tout au long de l’année, vous proposez des récits éloquents sur vos efforts de durabilité, à la fin tout le matériel nécessaire à l’élaboration de votre rapport sera déjà prêt. »
Le besoin de transparence, de clarté et d’exhaustivité est-il compatible avec une interprétation créative de la communication sur le développement durable ?
Lombaerts : « Je dirais même plus : ici aussi, la créativité est la clé du succès. Il s’agit de convaincre les gens qu’il est judicieux de s’engager dans cette voie. Cela relève d’un vrai défi, et il faut donc présenter le développement durable d’une manière qui les interpelle. »
Van Gils : « Dans un contexte de sustainability fatigue et le brouhaha de mots buzz et de clichés qui fusent de partout et blindent le consommateur contre ce type de message, voire l’irritent, le besoin de récits authentiques, de modèles et d’expertise est grand. Pour inspirer et transformer les visions du monde, nous devons imaginer de nouveaux récits qui peuvent recevoir l’approbation des gens et auxquels ceux-ci peuvent s’identifier. À l’aide de récits mémorables, vous pouvez par exemple changer l’idée qu’une fête n’est sympa que si l’on a acheté de nouveaux vêtements exprès, ou que chaque nouveau-né a absolument besoin d’une liste de naissance et d’une garde-robe complète.
À qui donnez-vous la parole dans vos récits de durabilité ?
Lombaerts : « Les experts d’expérience sont souvent idéalement placés pour offrir un témoignage authentique. Si, en tant qu’entreprise, vous visez un certain quota en termes de femmes occupant des postes de direction, alors invitez la femme CIO à raconter son histoire. Le ‘bottom up’ est vraiment une notion clé dans la communication de vos propres efforts.
Van Gils : « Dans le volet de la communication plus inspirante, l’accent glisse idéalement vers des voix extérieures. Pour promouvoir une vision du monde, il peut s’avérer intéressant d’écouter les gens qui n’ont justement qu’un rapport relativement limité avec votre organisation, tels que les experts. Le Sustainapoll de Bpact révèle que les consommateurs accordent surtout de la crédibilité aux experts du développement durable. »
Dans la communication sur le développement durable, les gens de la communication sont-ils livrés à eux-mêmes ?
Van Gils : « La communication sur le développement durable ne peut jamais être la responsabilité exclusive de l’équipe de communication. Le responsable du développement durable, le comité de direction, le responsable de la chaîne logistique, le marketing, la communication : il convient de constituer une équipe issue de tous les coins de l’organisation, car la collaboration est cruciale. Tout le monde ou presque devra d’ailleurs se remettre à niveau sur le sujet. »
Lombaerts : « Par définition, une approche réussie brise les silos et est multidisciplinaire. »
Pour terminer : avez-vous un conseil ultime à donner ?
Lombaerts : « Il ne faut pas oublier que la communication sur la durabilité doit elle-même être durable. Efforcez-vous de bien gérer votre production de contenu et visez un nombre minimum de tournages, de reportages et de déplacements. »