Les grandes tendances en content marketing
« Les principes du content marketing se sont généralisés et font désormais partie intégrante du métier du marketing », entend-on du côté de Reinhard De Milt et Jonas Vandroemme (com&co). « Ce qui nous frappe, c’est que ces mêmes principes sont de plus en plus mis à profit pour rendre d’autres branches de la communication B2B plus efficaces également. La communication interne, l’employer branding et la communication sur le développement durable commencent par un récit particulièrement pertinent et partent des besoins et attentes de la cible. »
Koen Denolf (The Fat Lady) constate que le contenu ne se limite plus au département de communication. « Chaque facette d’une entreprise offre des possibilités de création et de partage de contenus de valeur. Qu’il s’agisse de processus internes, de projets innovants, voire de la culture d’entreprise, tout peut servir de source et de munition pour le content marketing. »
Selon Frank Goetmaeckers (f-twee), il est important de relever la régression du podcast. « La nouvelle méthode d’évaluation – justifiée –, où ce qui compte n’est pas le nombre de téléchargements automatiques, mais le nombre d’écoutes effectives, fait des trous dans les plans conçus pour attirer des annonceurs. » Outre l’IA, Mie Van der Auwera (MMBSY) perçoit deux tendances très intéressantes. « Le Search glisse vers les canaux de médias sociaux : comme les cibles plus jeunes se tournent vers les médias sociaux pour trouver des réponses, des adaptations dans les stratégies de contenu s’imposent. De plus, suite à l’utilisation accrue d’assistants vocaux le contenu doit capitaliser sur les recherches plus informelles et conversationnelles. »
Le content marketing en 2024
« Le contenu sera intégré dans de nombreux projets et processus et ne sera donc plus nécessairement identifié sous le label du content marketing », prédit Denolf. « Les marketeurs devront relever le défi de tout superviser et d’assembler tous ces éléments de manière logique. » Du moins, si les marques continuent à miser sur les agences, car selon Goetmaeckers plus de clients diront ‘nous pouvons faire ça nous-mêmes’. « La stratégie reste cruciale et reste une bonne base de départ et de développement », dit Maureen Ranson (Propaganda), qui à son tour partage une première de trois attentes.
Par ailleurs, Ranson met en exergue les mots-clés que sont personal branding, visages et authenticité. « Les gens aiment voire des gens. Je pense que pour atteindre leur cible les marques mettront en avant davantage d’ambassadeurs. » Toujours selon elle, le contenu sur le développement durable est tout sauf une tendance passagère. « La tendance se poursuivra et jouera un rôle toujours plus important. Pas uniquement dans le contenu, mais aussi dans les publicités. Pensez par exemple aux annonces YouTube sur les initiatives de développement durable de marques comme Bueno et Kinder. » Selon Bart Lombaerts (SPYKE) aussi, cette communication sur le développement durable sera la tendance en vue pour 2024. « Peut-être pas parce que les entreprises le veulent, mais surtout parce qu’elles y sont obligées », dit-il en faisant référence à l’obligation pour les sociétés cotées en bourse et les très grandes entreprises de rendre compte de leurs efforts dans ce domaine. « Cela risque d’être perçu comme une menace, alors que nous considérons la communication sur le développement durable comme une gigantesque opportunité. »
« La volonté de simplification », lance Bert Goessens (Bold&pepper) en regardant vers l’avenir. « Il est évident que dans le content marketing il est essentiel de transmettre son message de manière claire, mais on constate aujourd’hui que tant les clients commerciaux que non-commerciaux poussent ce principe à fond. Dans de nombreux projets et pitchs, des termes comme ‘snackable’ et ‘Bumba-proof’ font leur apparition. La demande est aux messages concis, aux mots simples, aux explications sans trop de fioritures. D’un autre côté, cette tendance a aussi des limites. Je suis curieux de savoir si, en 2024, nous atteindrons déjà un point où, parmi tous ces shorties, un long spot de plusieurs minutes, un magazine consacré à un sujet particulier ou un article de plus d’une page A4 sortiront davantage du lot. »
Opportunités en content marketing
Lorsque nous sondons nos interlocuteurs sur les plus grandes opportunités de 2024, plusieurs choses sont évoquées. Els Mortier (Propaganda Group) pense à la disparition des cookies tiers et la conscientisation accrue sur ce sujet chez le client. « Cela entraîne un shift vers la création de ses propres écosystèmes, les entreprise collectant elles-mêmes les données pertinentes de leurs utilisateurs finaux. Comme la création de valeur pour le consommateur – en échange de ses informations personnelles – est essentielle à cet égard, cette évolution offre certainement l’occasion d’ancrer le content marketing de manière stratégique davantage encore. Et d’alimenter davantage la créativité du content marketing à partir d’une approche basée sur les données. »
« La content governance, avec des accords clairs et, surtout, les bonnes personnes au bon endroit, est importante, comme l’est un contenu distinctif », dixit Ranson. « Dans un contexte submergé de contenus, la créativité reste indispensable. Créer des formats solides, les tester et les réinventer reste une grande opportunité. »
Quant à Goessens, il met en exergue le pouvoir de l’employer content. « La communication B2E a très clairement le vent en poupe. Le collaborateur en tant qu’influenceur corporate devient plus important que jamais. C’est un plaisir d’y participer, car cela cadre parfaitement dans une vision du contenu centrée sur l’être humain. »
Défis en content marketing
À l’autre extrême, celle des défis, Goessens voit tout comme Goetmaeckers que les annonceurs réalisent de plus en plus d’activités de communication et de marketing en interne. « Restrictions budgétaires, crises, … Il y avait toujours bien quelque chose en 2023. Cependant, il s’agit sans doute d’un mouvement de balancier, et nous savons que les agences de marketing de contenu finiront par revenir à bord. En fin de compte, une collaboration avec des parties externes rend le processus plus créatif et aide les annonceurs et les pouvoirs publics à communiquer clairement et humainement envers la cible, l’esprit ouvert. »
Goetmaeckers taxe la demande d’un retour sur investissement de menace, et nous captons le même signal chez Ranson. « Vous ne réussirez pas à vendre plus à long terme si vous vous focalisez uniquement sur les ventes ou le contenu qui y contribue. Beaucoup de gens ne sont pas encore conscients d’un problème et n’ont que faire de votre solution. Même s’il nous arrive de courir des sprints, le content marketing reste vraiment un marathon. »
Denolf est vigilant face au contenus inférieurs. « La médiocrité, le fait de miser sur du contenu générique piloté par l’IA sous le couvert de l’efficacité, constitue une grande menace. De tels contenus auront un impact sur l’efficacité moyenne et donc sur la crédibilité du content marketing. » Mortier est entièrement d’accord. « À court terme, une telle approche peut créer un pic de trafic, mais en raison de la qualité et de la pertinence limitées du contenu l’impact disparaît inexorablement. »
L’IA : tant une tendance qu’une opportunité et un défi
Les content marketers indiquent clairement que l’IA présente des risques à plusieurs niveaux. Il est indéniable qu’elle présente des opportunités pour la discipline, mais la prudence et l’attention à la confidentialité, à la transparence et à la qualité s’imposent. Van der Auwera résume bien la teneur nuancée de la situation. « L’intelligence artificielle révolutionne la création de contenu grâce à l’automatisation et constitue un outil puissant de personnalisation. L’IA rationalise le référencement, optimise les mots-clés et effectue des analyses concurrentielles. En d’autres termes, l’IA est imprégné de toutes les facettes du content marketing. Pourtant, l’IA n’est pas en mesure de reproduire l’empathie profonde et les nuances culturelles de créateurs humains. La valeur d’un contenu authentique et humain, ancré dans des expériences personnelles et des récits uniques, reste inégalée. Les content marketers peuvent certes exploiter l’IA pour des tâches routinières, mais les non-professionnels peuvent eux aussi s’y frotter et ainsi mettre le secteur sous pression. L’IA est donc à la fois une opportunité et un défi. »
« Nous aussi, nous suivons les développements dans le domaine de l’IA générative à la trace », signalent les stratèges de com&co. « Nous embrassons la technologie et explorons pleinement les moyens de faire appel à de nouveaux outils de manière structurelle. Nous ne savons pas de quoi sera fait l’avenir, mais nous savons qu’un âge d’or s’annonce pour les entreprises et les agences qui oseront transcender la médiocrité sécurisante. Du fait que l’IA augmente le flux de commodity content médiocre, les acteurs avec une voix unique, des perspectives exceptionnelles, des opinions abrasives ou des approches radicalement créatives sortiront plus que jamais du lot. » Et Bart Lombaerts d’ajouter : « Le contenu créé sur une base journalistique peut constituer une réponse à cela. »
« La technologie est tellement disruptive que bon nombre d’agences devront réfléchir à leur positionnement et agir en conséquence », affirme Goessens. « Vous verrez certainement cette répercussion chez les annonceurs : opteront-ils pour la l’amoncellement rapide de contenus artificiels – et médiocres – ou prévilégieront-ils la qualité avec une perspective humaine ? Ce sera la grand écart de l’année. » Il paraît qu’une autre tendance en découle. « Fournir une preuve de fiabilité devient un impératif stratégique qui donne aux marques un avantage concurrentiel. Et c’est une bonne chose. Car qui a besoin de deepfakes quand on peut donner la parole à de vraies personnes ? »